Julien Jabre

Julien Jabre

Aujourd’hui en ce 29 Juin, sort l’album de Julien Jabre avec Dj Grégory « House masters » sur le Label Defected… Julien Jabre s’est livré à une interview Soonnight pour que l’on en sache un peu plus sur lui !

Soonnight : Bonjour Julien, peux-tu dans un premier temps expliquer ton parcours, car on ne connaît pas grand-chose de toi ?

JJ : Je suis venu à la musique électronique après être passé par le Rap lorsque j’étais adolescent. Et, j’ai commencé par être Dj vers 14/15 ans dans ma chambre. Je suis devenu fan de l’émission de Dj Deep sur FG en 1995, qu’il animait par la suite avec Grégory et Alex from Tokyo. J’ai voulu le rencontrer, donc j’ai appelé la radio. Ils m’ont dit de passé. Dès mon arrivée, je tombe sur Grégory pour sa 1ère émission. On s’est très bien entendu. J’avais quelques années de moins que lui. Quelques mois plus tard, il part faire un voyage à New-York, donc il ne pouvait pas assurer son émission. Il m’a proposé de le remplacer. Auparavant, j’étais passé lui montrer mon style de mix et mes goûts. Puis, j’ai commencé à faire de la musique avec Grégory au bout de 6/8 mois car il avait déjà un Home-studio. On a sorti notre 1er titre Fantom « Faithful » en 1997 ; qui avait pas mal marché d’ailleurs. Ensuite, étant devenu très ami avec Dj Deep, on a commencé à travailler ensemble également. En 1998, Grégory part pour 2 ans à New-York et m’a proposé de continuer notre collaboration là-bas pour commencer un vrai projet musical : notre duo Soha. À cette même époque, j’ai commencé à composer mes premiers morceaux en solo qui sont sortis sur Basic recordings. En 2001, je monte mon propre label Elias, qui est aussi le nom de ma boîte de production.

Soonnight : Qu’est-ce qui t’a plus chez Gregory pour suivre une collaboration aussi intense ?

JJ : Nous avons un point commun, c’est que nous ne faisons pas de concessions dans la musique. Nous sommes très entiers. C’est quelqu’un de très généreux. Il m’a ouvert la porte alors que je n’avais pas grand-chose à lui apporter. Il est spontané et évidemment talentueux. Nous avons très vite su que nous étions complémentaire. Il faisait beaucoup de rythmiques, il était fasciné par les beats et posait des atmosphères qui me plaisaient. De mon côté, j’adorais les mélodies. Je privilégie l’émotion à l’énergie, même si l’un ne va pas sans l’autre.

Soonnight : Quelles étaient vos principales influences ?

JJ : À l’époque, les producteurs qui nous ont le plus marqué étaient les Masters At Work, Kerri Chandler et Lil’Louis, qui devint une référence. Il m’a ouvert les yeux sur la production et la manière d’aborder la musique « électronique ». Ses productions étaient très variées et j’aimais sa façon de marier les sons synthétiques et acoustiques.

Soonnight : Comment pourrais-tu décrire ton style musical en tant que Dj ?

JJ : J’ai arrêté d’être Dj, il y a quelque temps maintenant. J’ai refusé pendant très longtemps de le faire car je ne me sentais pas très à l’aise. Lorsque j’ai commencé à faire cette musique sur Paris, la scène était petite et il y avait déjà des artistes qui m’inspiraient comme Gregory, Alex (from Tokyo) et Dj Deep. Ils remplissaient très bien l’espace. Je suis vite passé côté de la production car je suis plus heureux devant mes machines que devant une table de mixage et des platines.

Soonnight : Alors comment décrirais-tu ton style en production ?

JJ : C’est très difficile ! Je varie sans cesse, j’ai toujours envie de découvrir de nouvelles choses. J’essaye de faire passer des humeurs et des émotions totalement diverses d’un titre à un autre sur une base rythmique qui me donne envie de danser. Je souhaite obtenir quelque chose d’harmonieux, qui me touche. Je n’ai pas de recette, c’est le feeling qui agit.

Soonnight : Est ce que ton son a évolué ?

JJ : C’est primordial pour moi d’évoluer sans cesse !

Soonnight : Vers quel style musical, aspirerais-tu pour la production dans l’avenir ?

JJ : Je continue à faire de la House et à côté de cela je fais pas mal de choses. Je travaille avec des artistes qui sont dans la Pop; en tant que compositeur et producteur. J’ai envie de développer ces collaborations. Je fais aussi de la musique à l’image. J’ai du mal à me cloîtrer dans un style. La musique de film me permet d’associer différents style et cela m’enrichit.

Soonnight : Avec quels artistes aimerais-tu collaborer ?

JJ : Je réfléchis en ce moment sur un futur projet. Mais je peux collaborer avec n’importe quel artiste qui me touche et qui m’inspire. En ce moment, je travaille avec un ami sur la production de son album. Nous travaillons sur le mélange des textures et les arrangements. Ce n’est pas du tout ma culture musicale à la base car j’arrive avec mon background de musique électronique, et très afro-américaine, tandis que lui vient plutôt de la chanson française, Gainsbourg, Brel… Notre collaboration est quelque chose de particulier, il a été surpris et moi ravi. Il y a tellement de choses à faire avec des artistes d’autres milieux. C’est intéressant de partager une vision différente de la musique. J’ai envie de développer des choses avec des artistes ouverts au mélange et à l’expérimentation.

Soonnight : Quel regard portes-tu sur la scène Électro/House ?

JJ : Je pense qu’il y a de très bonnes choses. Je ne suis plus autant informé qu’avant car j’ai d’autres activités qui me prennent plus de temps. Mais j’ai toujours mes amis Dj Deep et Gregory qui font toujours écouter des choses quand ils pensent qu’elles peuvent me plaire. Je trouve, surtout pour moi qui a toujours besoin d’harmonies, de mélodies, qu’il en manque. Il y a des grooves que l’on ne trouvait pas avant et qui sont super intéressants. Beaucoup de morceaux sonnent bien en club mais manquent d’émotions. On est face à de la musique très lancinante, hypnotique, ce que je peux apprécier, mais c’est rare qu’elle me procure des frissons.

Soonnight : Nous étions dans une tendance très underground/minimal, il paraît que le disco ferait son grand retour …

JJ : C’est ce que tout le monde dit. Un genre de disco moins arrangé et aux teintes plus électroniques. Une chose qui me plaît aujourd’hui, c’est le tempo qui a sensiblement ralenti pour revenir à celui des années 90 car il était monté jusqu’à 130/135 bpm, on n’arrivait plus à danser.

Soonnight : J’ai pu remarquer en m’informant sur le net que tu as ou t’es fait remixé par quelques Djs plus grand public tels que Martin Solveig ou la SHM…

JJ : Il y a eu un edit de Sebastian Ingrosso de Swimming Places d’après le remix de Dennis Ferre et Jérôme Sydenham. Il a fait un format gros club. Martin Solveig m’a proposé de faire un remix de Something Better. J’ai aussi remixé une chanson de Shakedown (Drowsy With Hope). Nous avons remixé les Masters At Work avec Gregory sous notre pseudo Soha.

Soonnight : Dans une précédente question, tu évoquais ton label Elias. Pourra-t’on retrouver de nouveaux artistes signés ?

JJ : Ce n’est pas d’actualité pour le moment.

Soonnight : Lors de tes productions, tu es plus Hardware ou Software ?

JJ : Je ne peux pas me passer de Hardware. Je suis de la vieille école malgré mon jeune âge. J’ai besoin de tourner les boutons quoique je fasse beaucoup de choses par ordinateur maintenant. J’adore aller mixer dans de grands studios. C’est un plaisir de se retrouver dans une grande salle avec une belle console analogique. Je prends vraiment du plaisir avec de vieilles machines qui colorent le son d’une certaine manière ; c’est comme faire de la peinture. Je ne peux pas me passer de mes vieux synthés car aucune émulation sur ordinateur n’aura jamais le même rendu. Malgré tout, il y a de très bonnes choses qui existent en Software et que j’utilise.

Soonnight : As-tu déjà intégré de vrais instruments dans tes productions ?

JJ : Bien sûr ! La 1ère fois que je l’ai fait c’était avec Dj Deep lorsqu’on a fait Dom Dom Jump, on avait enregistré Fred Melosax, un excellent saxophoniste. On ne l’a pas refait pendant longtemps. Aujourd’hui, j’associe des sons synthétiques à de vrais instruments. Le mélange des textures me passionne.

Soonnight : Il est rare que des Dj incluent de véritables instruments …

JJ : Aujourd’hui, la technologie nous offre une palette de synthé incroyable. Pour ma part, j’ai besoin de sentir la matière.


Soonnight : Le 29 Juin, sort sur Defected, ton album House Masters avec Dj Gregory. Quel est le concept ?

JJ : C’est une compilation de nos « meilleurs morceaux » et d’inédits regroupés dans un double CD. Un CD chacun, avec 10 tracks dans leur version longue. La compilation sort aussi en digital sur le net et comprendra en plus une dizaine de titres de notre duo Soha.

Soonnight : En parlant du net, la loi Hadopi revient faire surface. Quel regard portes-tu sur cette loi qui fait grand bruit ?

JJ : Je ne suis pas certain que la répression soit la solution à la crise du disque aujourd’hui. La loi Hadopi ,seule , ne relancera certainement pas l’achat de musique.
Depuis quelques années le public a accès à beaucoup plus de musique et beaucoup plus facilement. On ne reviendra plus en arrière, cette abondance est rentrée dans les mœurs. Il serait peut être plus judicieux de s’adapter à la nouvelle manière qu’a le public de consommer la musique. La licence globale est peut etre un bon complément à cette loi et ré injecterait des fonds dans l’industrie musicale.

Soonnight : Qu’écoutes-tu le plus en ce moment ?

JJ : En ce moment j’écoute un morceau de Nina Simone que je viens de découvrir. Il s’appelle Baltimore, c’est une reprise, je crois. Ce morceau mêle le jazz, le funk et le reggae. C’est magnifique. Il date du début des années 80.
Cela fait un an que je suis scotché sur un album d’un maître de la Kora, le Malien Toumani Diabaté et son album « The Mandé Variations ». Il maîtrise la Kora à la perfection. Le son de cet instrument est magique, entre la cithare et la harpe. J’adore son jeu en arpèges.
J’écoute beaucoup de Dub. Je commence un projet de remix de classiques de Dub Reggae pour label américain. C’est un projet qui m’excite beaucoup.
Le morceau « sonora » du pianiste de jazz Hampton Hawes. On y retrouve une teinte cinématique 70s à la francaise.


Soonnight : Quels sont tes prochains projets ?

JJ : Mon album de Dub, qui va me prendre pas mal de temps. Je vais réaliser l’album de chansons françaises de mon ami. J’ai collaboré avec Sophie Delila, on a fait un morceau ensemble que l’on a co-produit pour son album chez Universal et je pense que l’on va re-collaborer ensemble. J’ai 2 projets télévisuels, enfin pas mal de choses… Et puis, je vais bien sur continuer à travailler avec Defected.


Soonnight : Depuis combien de temps travailles-tu avec Defected ?

JJ : Depuis le debut des années 2000 Defected édite des compilations sur lesquelles on retrouve certains de mes morceaux. Nous travaillons en plus étroite collaboration depuis la sortie de mon titre Swimming places. Simon Dunmore, le boss du label avait entendu mon titre à la soirée Defected à Miami lorsque Gregory l’a passé. Le titre avait retourné le club à ma grande surprise.

Soonnight : Es-tu présent à la WMC ?

JJ : Je n’étais pas présent lors des deux dernières Winter. La Conférence a un peu dévié de ce qu’elle était. La 1ère fois que j’ai assisté à la WMC à Miami nous étions à peine 400 artistes/DJ. Maintenant, c’est un énorme phénomène qui englobe toute la Dance Music. Il y a toujours des choses intéressantes à découvrir, mais elles se retrouvent noyées dans la masse.

Soonnight : Que peut-on souhaiter à Julien Jabre ?

JJ : Avoir du temps, pour faire tout ce dont j’ai envie.

Un grand merci à Julien ainsi qu’à Toni du label Defected!
Interview réalisée par Angélique