Dennis Ferrer

Dennis Ferrer

L’année 2006 de Dennis Ferrer a été riche. Du Soul Heaven en compagnie de Kerri Chandler à son album solo (« the worl as I see it ») qui vient de sortir, Dennis Ferrer a été au cœur de l’actualité. Rencontre avec ce personnage surprenant et attachant.

Où serais-tu en ce moment si nous n’étions pas ensemble ?

Voyons… je serais sûrement dans mon studio où je passe le plus clair de mon temps. C’est en quelque sorte mon petit chez moi.

Que penses-tu de l’année qui vient de s’écouler ?

Cette année a été géniale, et assez imprévisible. J’ai pas mal tourné, j’ai fait beaucoup de remix, beaucoup de travail, surtout en tournée…En fait, j’ai vraiment l’impression d’être béni.

Des souvenirs en particulier ?

Oh, tu sais il y en a tellement eu.  En tant que musicien, on peu perdre un peu la boule avec toutes ces soirées folles. On perd un peu de vu ce qui se passe dans la vie de tous les jours. Cette année a été mémorable tout simplement grâce à l’amour que j’ai reçu à chacun de mes passages dans les clubs et surtout d’avoir une reconnaissance de mon travail.

As-tu l’impression d’être de plus en plus connu ? Je ne dirais pas de plus en plus, je dirais plutôt que j’intéresse un public de plus en plus large. C’est bon pour moi, et notre musique en général.

Tu as l’air assez humble non ?

Je fais tout pour l’être ! Beaucoup de gens dans ce métier ont une vie dissolue. Je pense que je suis chanceux d’avoir eu cette opportunité. C’est réellement une chance de pouvoir faire ce que je fais, et c’est pour cette raison que j’essaie de rester humble. Je suis juste un mec normal. Je suis le Dennis de tous les jours, je fais juste ce que les autres aimeraient faire.

Voyons donc si tu es comme monsieur tout le monde…Quelle est ta voiture et quelle montre as-tu au poigné ?

Je ne conduis plus. A w York, il est impossible de conduire, c’est inutile ! Et en ce qui concerne ma montre, je n’étais pas un grand fan de montres jusque là. J’ai eu cette petite montre au Portugal. C’est une jolie petite montre, rien d’extravagant. Tu sais, je n’ai jamais dépensé plus de 400 euros dans une montre. Enfin c’est peut-être extravagant pour certaines personnes mais moi je pense que… enfin bon c’est raisonnable on va dire 😉

D’où es-tu originaire?

Je suis né dans le Bronx, mais si tu parles de nationalité, je suis moitié Porto Ricain, moitié des Bermudes. Je suis un mec des Caraïbes !

Cela fait-il de toi un vrai Nuyorican ?

Oui en quelque sorte, et ce mélange donne une richesse au niveau culturel.

Tes parents ne voulaient-ils que tu ais un job “normal” ?

Tu m’étonnes ! Quel parent voudrait que son enfant fasse mon job ? Ils me disaient « Y a pas moyen, y a pas moyen ». J’ai bien eu un job dit « normal » à un moment. J’étais programmateur de logiciels pour une grosse boite d’assurance pendant des années. Il m’a fallu du temps pour avoir les c… de dire m… à tout et claquer la porte. Je me suis dis que j’allais faire ce qui me plait et que si je me ramassait, qu’il en soit ainsi. Mes parents n’étaient évidemment pas heureux.

Ils comprennent ce que tu fais maintenant?

Après avoir vu mon compte en banque, oui ! ah ah.

Sérieusement, comment ça s’est passé?

Super bien. Je veux dire, si vous gagnez en une soirée, 10 fois ce que votre père gagne en une journée, qu’est ce qu’il peut vous dire ? Mon père voyait plus ce coté là, matériel. Du côté de ma mère, c’était plutôt « fais ce qui te plait, la vie est courte, je te fais confiance, fais ce que tu as à faire. »

Donc maintenant ils comprennent que tu es un producteur/DJ de renommée internationale ?

Oui, ma mère le sait maintenant, mais elle n’aime toujours pas trop ça. Elle est assez old school, mais elle fait avec car elle n’a pas trop le choix.

Quelle était ta plus grande influence musicale avant la House ?

Quand j’étais gosse dans les années 80, NY était vraiment « l’endroit » en ce qui concerne la musique. A cette époque, il y avait tellement de styles musicaux, d’émissions radio, de stations, c’était incroyable. A n’importe quel moment de la journée il y avait du R’n’B old school et new school, du Motown, de la disco, du rock et du punk. Du coup en grandissant j’ai eu toutes ces influences.
Quand tu allais dans un club, tu pouvais très bien entendre du rock puis du punk l’heure d’après et tout ça se mariait très bien. Alors voilà d’où viennent mes influences. J’ai aussi écouté beaucoup de soul comme Donald Bird, The Black Birds, Quincy Jones et Roy Ayers. J’ai même écouté les Rolling Stones ; on entendait ça partout mais on s’en fout, c’était de la bonne musique. Je vais te faire un aveu…j’ai même écouté Kiss ! C’était LE truc !

Tant que ça avait du sens c’était bon, et je crois qu’en tant que musicien, t’as rien compris si tu vas pas voir un peu ce qui se fait dans d’autres styles. Pour moi, tout est un instrument : tes clefs qui font du bruit, c’est un instrument. La cloche qui sonne est un instrument pour mes oreilles, alors tout ce que j’écoute m’influence et écouter tous ces genres de musique c’est ton job de musicien, ton devoir. C’est comme ça que je vois les choses aujourd’hui, et je suis heureux d’avoir été exposé à tous ces styles.

On dirait que la Techno est de nouveau à la mode. Qu’est ce que ça t’inspire ?
En fait je viens de là, c’est mon histoire. Je crois en fait que cette mode est due à l’avancée technologique qui permet de faire de plus en plus de choses. Je pense que c’est une bonne chose de l’intégrer dans ce que l’on fait, et de l’utiliser à son avantage. Comme c’est à la mode, je peux revisiter mon passé et réutiliser ce que j’aimais. Mais c’est comme ça pour tout. Tout reviens à la mode un jour, et tu peux t’en resservir, tant mieux !

Tu utilises donc ton background “techno” dans ta musique actuelle?

Oui, c’était évident quand j’ai fait « sand castles ». On pensait que tout était un peu trop ennuyant. On voulait épicer un peu le truc et trouver un trip nouveau. On a fait le trip africain, le trip gospel, un truc nu soul, alors on s’est dit « qu’est ce qu’on peut faire ? ». C’est là que Jerome Sidem, qui fait partie du groupe, m’a dit « mec tu dois revisiter ton passé ». Au début, je ne pensais pas que ça puisse marcher. Mais tout le monde s’y est mis, et tout d’un coup ça a explosé un an après la sortie.

Tu ne te rendais pas compte que ça allait être énorme quand tu as fait ce morceau ?

Juste une anecdote : j’étais dans le studio et Jérôme est monté faire une petite sieste. J’ai commencé à chantonner la partie vocale, et je me suis dit « ouais c’est mignon, mais il faut quelque chose d’autre ». J’ai commencé à ajouter des cordes, et c’est là que j’ai compris qu’on tenait un truc. J’ai alors appelé Jerôme, on a écouté et on a su qu’on avait quelque chose de spécial, mais sans savoir que ça allait être « si » spécial. On aimait bien, mais est-ce que les gens allaient aimer aussi ? J’ai vraiment eu peur de ce disc, vraiment.

Mais finalement, tout s’est bien passé !

Oui, et c’est là tout le paradoxe. Dès que tu commences à croire en ton propre son, personne n’aime, et des que tu doutes, tout le monde adore ! J’espère que je vais détester tous mes prochains disques maintenant ahah.

Tu dis que tu passes du temps dans ton studio. Tu as quelle tête quand tu en sors ?

J’ai le visage vert, c’est le bronzage « studio » ! Mais je ne peux pas faire autrement. C’est mon job, je mets en musique mes sentiments, tout ce qui m’arrive dans la journée, etc. C’est super parce que je fais ce que j’aime tout en étant payé. Si seulement tout le monde pouvait vivre comme ça…

Merci à Defected
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