La Musique perd Pierre Boulez

La Musique perd Pierre Boulez

Et un de plus… On ne peut pas dire que 2016 porte chance aux grands artistes français : Michel Delpech, Michel Galabru et maintenant Pierre Boulez. Ce dernier donna énormément à la grande musique, à la composition française et à la France.

En effet, Pierre Boulez s’est donné corps et âme en France pour défendre la musique classique et plus particulièrement la musique contemporaine et son oeuvre. Avant-gardiste, Boulez était le compositeur le plus célèbre dans le monde, le plus écouté et le plus craint de sa génération. En plus de son aura, son influence et son pouvoir ont fait de lui une personne importante du circuit car en plus d’être compositeur, il fut chef d’orchestre, théoricien et fondateur de l’Ensemble InterContemporain & de l’Institut de Recherche et de Coordination Acoustique/musique (Ircam).

Entre deux vols, deux valises, deux fuseaux horaires, j’eus le temps de le recontrer plusieurs fois. La première d’entre elle ? Un stage à la Villette, au sein même de son institution : EIC. Dès le master entre dans les locaux, il faut que tout soit tiré au cordeau, le vouvoiement est de rigueur. Avant chaque répétition, l’alignement des chaises doit être parfait, et le plateau rangé et propre. Lors de mes études de musique au Lycée de Sèvres, en section Brevet de Technicien des Métiers de la Musique, l’Ensemble InterContemporain accepta mon dossier pour un stage de plusieurs mois au sein même de la structure entre régie d’orchestre, direction artistique et bibliothéque d’orchestre. Durant ces semaines, Pierre Boulez fit irruption. Quel honneur de le rencontrer. Mais quel angle d’attaque pour amorcer la première conversation ? Son péché-mignon, la bonne bouffe. Bingo! Les crêpes seront mes armes pour conquérir ce grand compositeur. Sur la petite table de la salle de repos de l’orchestre, je prépare une crêpe au Nutella dans une belle assiette, fourchette-couteau et verre d’eau. Lovée dans un fauteuil à quelques mètres de lui, j’attends ses réactions. Après quelques coups de fourchette, il se retourne vers moi en me demandant d’avancer. Il me félicita et commença à me raconter des anecdotes « L’odeur de ses crêpes me rappelle celles que je mangeais à New York, dans une crêperie tenue par des bretons proche de la 5ème Avenue » et continua « J’allais manger chez eux, à chacun de mes passages à New York, c’était devenu ma cantine ».

Durant les semaines qui suivirent, il me conta ses souvenirs avec Olivier Messiaen qui a beaucoup influencé son oeuvre ou encore ses crises de rire avec John Cage dans leurs chambres de bonne dans le quartier du Marais. Lorsqu’il prenait le rôle de Chef d’Orchestre, d’autres images lui reviennent en tête. Car depuis 1957, il n’a pas arrêté de diriger les plus beaux orchestres mondiaux. Lorsque l’orchestre se déplaçait au Centre Georges Pompidou, son franc-parler était de retour pour ressasser des souvenirs aux débuts de l’IRCAM, à quelques mètres du CGP…

Boulez, tu vas nous manquer!