Boys Noize by Ludovic Rambaud

Boys Noize by Ludovic Rambaud

Boys Noize by Ludovic Rambaud

C’est le 8 Octobre, jour même de la sortie de son 3ème album ‘Out Of The Black’, que Boys Noize a répondu à mes questions. La hype autour de ce trentenaire allemand n’est jamais vraiment retombée. Précurseur, habile compositeur, communicant hors norme, Boys Noize a su faire de son style musical une vraie marque de fabrique, sans jamais fermer les portes à quelconque collaboration. Malgré sa casquette de producteur de plus en plus imposante (Scissor Sisters, Chilly Gonzales, Spank Rock…), une liste de remixes (Justice, Feist, Depeche Mode…) à faire pâlir les plus ambitieux et des collaborations en cascade (Erol Alkan, Mr Oizo, Skrillex), Alex Ridha n’oublie pas de cultiver sa propre identité musicale. Il aime aussi se lancer de nouveaux défis, comme ce nouveau Live sur lequel il a passé les derniers mois à travailler, qui a eu lieu à La Cigale (Paris) le 2 Novembre. Voici donc une interview bienvenue pour se mettre en bouche…


Crédit photo : Bjorn Jonas

Enfin, après plusieurs mois d’attente interminable, ton 3ème album est disponible…

Très longue attente… Ce n’est jamais drôle quand tu dois attendre plusieurs mois avant la sortie commerciale alors que tout est déjà prêt…

Le titre de l’album est ‘Out Of The Black‘. As-tu choisi le mot « Black » pour contredire un peu la tendance « Fluo Kids » qui accompagne ta musique depuis tes débuts ?

Intéressante comme analyse, je n’y avais pas pensé ! (rires) Maintenant que tu en parles, je trouve ça assez pertinent, oui… Je valide ! (rires) Non, à la base, le titre a été choisi en rapport avec l’expression anglaise « Out of the blue ». J’ai juste changé le bleu par le noir car je produis toujours la nuit et que ça sonnait cool…

Ça ne signifie donc pas que cet album est sombre et torturé ?

Non, je pense que tout cela est très subjectif de toute façon. Certaines chansons très sombres peuvent nous rendre heureux, c’est juste une question d’interprétation. Je suis parfois surpris du contexte dans lequel les gens écoutent ma musique, et ce depuis mon premier album ‘Oi Oi Oi‘. Des fans me disaient qu’ils écoutaient mon album pour se rendre sur leur lieu de travail, alors que d’autres l’écoutaient pour se défouler chez eux… Il n’y a pas vraiment de règle ! (rires)

C’est un album très éclectique, avec des influences rock, hip-hop, épiques à la Daft Punk… Tu as toujours souhaité cette approche 360° dans ta musique ?

Exactement ! J’ai toujours expérimenté plusieurs styles dans ma musique, tout en cherchant à avoir le plus de cohérence possible. Je ne me suis jamais réduit à un seul style, j’aime tout mélanger.

Pourtant, ta force est qu’on reconnaît tout de suite ton style !

Ça me fait très plaisir que tu me dises ça car c’est certainement ce qu’il y a de plus dur pour un artiste, à savoir trouver une identité qui fait en sorte que les gens te reconnaissent dès les premières secondes d’un titre.

What You Want‘, c’est du pur Boys Noize par exemple…

(rires) Pas faux !

J’imagine que tu ouvriras ton nouveau Live avec ce track ?

Pourquoi pas… (rires) Je ne peux pas te dire vraiment ce que je prépare au niveau de mon Live. Il y aura un élément absolument incroyable avec moi sur scène. J’ai passé beaucoup de temps sur ce Live ces derniers mois et j’ai hâte de voir comment le public va réagir. Je peux juste te dire que je ne jouerai que des titres à moi, anciens et nouveaux tous mélangés…

Cet élément, ce sera un invité, un élément technologique ? Tu peux quand même nous donner un indice ?

Oui, c’est du domaine de la technologie. L’indice que je peux te donner, c’est que cet élément n’est pas vraiment humain…

Un robot ?

Peut-être (sourires aux lèvres)…

La plupart des titres de ‘Out Of The Black‘ sont instrumentaux mais il y a un duo très remarqué avec Snoop Dog… Je crois savoir que le titre qui est finalement sur l’album n’est pas celui qui était prévu…

Tu as raison, on devait normalement faire une sorte de cover des Jungle Brothers ‘I’ll House You‘ mais on n’a pas pu clearer à temps les droits au niveau du publishing. Du coup, on a switché sur un autre titre, ‘Got It‘, qui était un titre que j’avais composé pour le prochain album de Snoop.

Tu es fier d’avoir quelqu’un comme lui sur ton LP ?

Pour moi, Snoop Dog est une vraie référence. J’ai grandi avec sa musique, c’était un rêve ultime de pouvoir collaborer avec lui. Je voulais vraiment éviter de tomber dans la facilité, j’aurais pu faire un titre électro-house de base et lui demander de poser sa voix par dessus… J’ai préféré prouver à beaucoup que le super-underground est encore possible avec lui !

D’autres comme David Guetta ne se sont pas gênés pour faire l’inverse…

C’est pour ça que je voulais un retour aux sources avec lui. Il a adoré mon instru, il m’a dit qu’il l’écoutait en boucle dans son iPod. Puis je l’ai rencontré à Los Angeles pour finaliser ça dans son studio. Ce n’était pas évident de caler ce moment avec lui, c’était tellement fort pour moi !

D’une manière générale, tu es habitué aux collaborations : Chilly Gonzales, Scissor Sisters, Mr Oizo (ndlr : sous le pseudo Handbraekes)… Mais rien sur cet album !

Oui, j’aime faire la part des choses. Sur mon propre album, je ne m’imagine pas être dans une logique de collaboration, je suis plutôt à la recherche de chansons qui me ressemblent vraiment. Je n’ai jamais été fan des albums avec trop de featurings. C’est trop facile de faire du name-dropping, même si je sais que c’est une manière sûre d’avoir un succès plus large et rapide. Je préfère le défi et mettre ma voix robotique sur mes titres… (rires) Je ne suis pas à l’aise avec d’autres chanteurs.

Les collaborations restent donc des projets parallèles ?

Oui, avec Oizo et Erol Alkan, le processus est différent.

Tu as aussi récemment travaillé avec Skrillex sous le nom Dog Pound, non ?

J’ai entendu parler de ça en effet… C’est probable. J’ai écouté deux titres, plutôt bons d’ailleurs (rires)…

Niveau studio, as-tu changé ta méthode 5 ans après ‘Oi Oi Oi‘ ?

Non pas vraiment, j’utilise toujours les mêmes machines. Je pars de zéro et je ne me mets pas de limite technologique. Je n’utilise jamais les mêmes sons de batterie par exemple, ça fait partie de ma manière de travailler. J’achète toujours beaucoup de nouveaux plug-in : Tempest pour les beats, de nouveaux synthés… J’adore dénicher de nouveaux logiciels pour transformer mes sons. Je pars toujours de machines analogiques pour enregistrer mes pistes mais je n’utilise jamais les sons d’origine. Je les trafique toujours. Je suis donc une sorte de geek et j’aime d’ailleurs passer du temps avec mes amis de Sugar Bytes à Berlin, qui sortent toujours d’excellents outils pour changer mes sons.

Il y a une énergie très Live sur ce nouvel album je trouve, parfois assez rock au niveau des pistes de batterie…

Tout à fait. Je ne sais pas jouer de batterie mais je sample de vraies parties de batterie, que je juxtapose avec des boîtes à rythme.


Crédit photo : Bjorn Jonas

Ton univers sonore a souvent été copié. C’est dur à supporter ou tu prends ça comme un compliment ?

Un peu des deux. Je ne comprends pas les producteurs qui se copient à la virgule près. Ce n’est pas dans mon approche de la musique. Mais d’un autre côté, c’est un compliment de voir tant de gens essayer de sonner comme toi. D’être un peu comme leur référence…

Ton slogan « Don’t believe the Hype » est-il toujours autant d’actualité ?

Oui, vraiment. Ce slogan colle aussi très bien à ce nouvel album. Je me suis enfermé dans mon studio, j’ai essayé de ne pas me laisser divertir dans la composition de l’album. De n’entendre que moi.

La scène EDM est énorme aujourd’hui, tu t’attendais à une telle expansion ?

Non, jamais de la vie ! A la base, ma musique était destinée aux DJs uniquement. C’est une vraie surprise de voir à quel point l’électro a séduit le grand public. Je pense que ça va durer, la dynamique est très forte et on est dans le mainstream maintenant, plus seulement dans l’underground. Je crois qu’il va falloir encore attendre plusieurs années avant de voir les guitares détrôner les ordinateurs… (rires) Les cartes sont entre nos mains !

Es-tu fatigué de ta vie effrénée de DJ-producteur ?

Non, je ne sens pas de lassitude car ma passion pour la musique est aussi forte qu’à mes débuts. Tant que je trouverai de la musique assez fraîche pour mes oreilles, je continuerai à croquer cette vie à pleine dent.

Un mot sur tes labels Boysnoize et Boysnoize Trax, pas trop dur en terme de business ?

Pour un label, c’est difficile de survivre quand tu ne vends pas beaucoup de musique. (rires) Mon équipe et moi voulons de toute manière que ces labels restent petits. Je ne les ai pas créés pour faire de l’argent. Ça n’a jamais été mon propos. Ce sont des plateformes pour sortir de la bonne musique électronique indépendante et avoir de l’actualité en permanence…

Et, bizarremment, tu signes beaucoup de Français (Electric Rescue, Les Petits Pilous, Djedjotronic, Maxime Dangles, Maelstrom, etc…) !

(rires) C’est vrai ! J’aimerais signer plus d’Allemands… Mais ils font tous la même deep-house (rires).. J’ai toujours été fan de la scène électro française, depuis que je suis DJ. Il y a un son particulier, pas seulement l’époque french-touch mais dès les années 70-80, avec Jean-Michel Jarre par exemple. C’est de la bonne musique, avec une approche innovante. Et puis le public français a toujours beaucoup soutenu ma musique. C’est un bon deal, on a un bon vrai feeling !

Boys Noize ‘Out Of The Black’ (Boysnoize records)

Lien écoute album sur Soundcloud

Propos recueillis par Ludovic Rambaud